La méthode de Singapour

Méthodologie
6/2/2025

Suite à la publication des résultats de l'enquête Pisa, qui a sondé 690 000 élèves dans 81 pays, Gabriel Attal (ministre de l’éducation nationale à ce moment) a annoncé une série de mesures visant à accroître le niveau d'exigence à l'école. Depuis la création de PISA en 2000, on observe une chute sans précédent du score moyen de la quasi-totalité des pays, avec une baisse très significative en mathématiques. En France, la situation est encore plus alarmante, avec une chute de 21 points en mathématiques entre 2018 et 2022 (la moyenne étant de 10 points pour le reste des pays.)La quasi-totalité des pays... sauf quelques-uns, notamment des pays asiatiques, qui arrivent à tirer leur épingle du jeu en se hissant régulièrement aux premières places du podium. Un de ces pays en particulier a retenu l’attention mondiale, grâce à son approche pédagogique novatrice. Occupant la première position du classement, Singapour se distingue nettement de la France, qui se classe 22e parmi les 38 pays de l'OCDE.Quel est donc le secret qui se cache derrière la méthode de Singapour ?

Source : lasalledesmaitres.com

L'essence de la méthode de Singapour met l'accent sur la compréhension, aussi bien conceptuelle que concrète, des notions plutôt que sur la simple mémorisation des faits et l’abstraction pure. L'idée maîtresse est d'offrir aux élèves une perspective pratique des concepts mathématiques, favorisant ainsi une résolution de problèmes plus “sensorielle”.Un aspect central de cette méthode est l'utilisation de matériel concret et visuel, permettant aux élèves de manipuler et de visualiser des concepts abstraits. Cette approche se décompose en trois étapes...

La modélisation

Les élèves sont encouragés à représenter les situations mathématiques à l'aide de "schémas en barres", offrant ainsi une visualisation tangible des quantités en jeu. Ces représentations semi-concrètes aident les élèves à donner un sens concret aux nombres et aux opérations, tout en constituant un support essentiel à leur raisonnement.

L'approche «concrète-imagée-abstraite»

Chaque concept est introduit initialement de manière concrète à l’aide de cubes, de bâtonnets, etc. offrant ainsi aux élèves l'opportunité de manipuler et de toucher. Ensuite, la situation est représentée de manière imagée, soit par l'élève lui-même, soit en binôme. Pour finir, arrive l’étape de l’abstraction, où la situation est formalisée mathématiquement à l’aide de symboles.

La verbalisation

L'enseignant joue ici un rôle crucial en fournissant de nombreux exemples pour aider les élèves à expliquer les étapes qui mènent à la résolution du problème. La rétroaction, permettant au professeur de corriger immédiatement les mauvaises conceptions, est prévue et planifiée séance par séance, avec une phase de pratique guidée (20 minutes) suivie d'une phase de pratique autonome (20 minutes). L'objectivation des connaissances, où les élèves expriment à voix haute ce qu'ils ont appris pour favoriser leur métacognition, est essentielle à chaque séance.

La méthode se concentre délibérément sur la compréhension des opérations : d’abord le “pourquoi”, ensuite le “comment”. Par exemple, l'addition est étudiée de manière approfondie au début du CP, se concentrant sur les nombres de 0 à 10 et explicitant sa signification -ajouter ou assembler- mais sans s’attarder sur les procédures de calcul en elles-mêmes. Cette progression, initialement lente, permet une exploration approfondie, dépassant les exigences du programme officiel à la fin de l'école primaire : les problèmes abordés au CM1 et CM2 atteignent un niveau équivalent à celui du collège.

« En primaire, et même avant, l’enfant est au stade des opérations concrètes. Il doit toucher, mesurer, construire avec ses mains, ressentir directement avec son corps, comme dans un jeu, ne surtout pas être passif. » Monica Neagoy (docteur en didactique des mathématiques).

L'élève apprend en étant actif : il ne se contente pas de recevoir passivement les informations, il est au coeur du processus d’apprentissage.Il apprend en échangeant avec ses pairs : il s'habitue à verbaliser les concepts et à comparer son raisonnement à celui des autres.Il apprend en s'entraînant : les nombreux exercices, très progressifs, lui permettent d'appliquer les notions apprises. Il apprend en cherchant : la méthode apprend aux élèves à réfléchir de façon autonome, à penser les mathématiques, et non pas à se contenter d’appliquer de manière mécanique. Il apprend en faisant le lien avec la vie quotidienne : les exercices sont basés sur des situations concrètes et tangibles.

En somme, cette méthode offre une approche équilibrée et dynamique des mathématiques, contribuant ainsi à former des apprenants éclairés et compétents. La méthode de Singapour, par sa philosophie pédagogique unique, remet en question l'approche privilégiée en France, qui se focalise bien trop souvent sur l'aspect abstrait des mathématiques. Son originalité réside dans sa capacité à intégrer les mathématiques dans le tissu même de la vie quotidienne.Plutôt que de les enfermer dans un monde abstrait, rempli de théorèmes et de conjectures qui peuvent sembler déconnectés de la réalité, elle les invite à explorer les aspects mathématiques de leur environnement, faisant des mathématiques une discipline vivante, concrète... et quotidienne !

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